Entre les gouttes, ou presque

Soyez prévenus, cette étape ne regorgera pas de péripéties palpitantes. Ni de péripéties insignifiantes, maintenant que j’y pense. Il n’y aura en fait ni rencontre ni chute et encore moins de sangliers, mais pas mal de boue et beaucoup d’arbres. Ah ça, pour sûr il y en a eu à foison !

Il a plu violemment toute la nuit et cela ne s’était pas calmé alors que nous prenions notre déjeuner. Nous avons dès lors préféré ne pas nous hâter en espérant une accalmie et ce n’est que vers 9 heures que nous avons pris la route. Vêtus de nos beaux K-ways, nous avons traversé les rues fatiguées de Pontassieve qui se remettaient doucement de leur soirée de liesse, tapissées de frites et de serviettes détrempées. Alors que les balayeurs s’activaient, les commerçants garnissaient leurs étals et nous avons acheté quelques fruits et légumes pour midi.

A peine le pont sur la Sieve traversé, la pluie a cessé et nous avons pu retirer nos K-ways. Nous avons suivi une petite route sur plusieurs kilomètres qui montait entre vignes et bosquets jusqu’à Diaccetto. Le dernier tronçon s’est révélé particulièrement pénible. Le sol était composé d’une sorte d’argile gorgée d’eau qui s’accrochait par plaques sous nos semelles et tentait de nous faire glisser. Nous y avons repéré des empreintes indiquant que deux personnes marchaient devant nous, sans doute un homme et une femme.

A Diaccetto, le guide nous promettait une pause au seul bar de l’étape. En raison de l’humidité, nous savions qu’il s’avérerait ardu de trouver une aire de repos durant la journée et nous aurions apprécié de nous asseoir une demi-heure au sec. Mais le bar, nous ne l’avons pas trouvé… Nous avons poursuivi notre route jusqu’à Ferrano, où nous avons fait halte sur des bancs humides, protégeant nos séants avec les K-ways.

Le chemin nous a ensuite conduits dans une belle forêt dense et brumeuse où chantaient de nombreux oiseaux. Mis à part une longue ascension et une vipère morte, pas grand chose d’autre à signaler. Peu avant le col de la Consuma, nous avons rejoint une route goudronnée plus importante mais sans grand danger et la pluie a recommencé à tomber. Nous avons rapidement parcouru les derniers mètres et nous sommes abrités dans le gîte qui nous héberge ce soir.

Les propriétaires étaient absents et nous avons dû patienter un bon quart d’heure au salon. Puisque nous étions trempés et frigorifiés, nous avons pris la liberté de faire un thé en les attendant. Elena est arrivée peu après les bras chargés de courses pour le souper. Elle est tout à fait charmante et propose un accueil parfait pour les marcheurs et pèlerins. Sa philosophie de partage et de simplicité était ce que nous cherchions sur ce genre d’itinéraire et nous sommes ravis de séjourner ici.

Après une bonne douche brûlante, nous avons fait quelques emplettes dans le bar-magasin du village. Nous avons ensuite soupé avec quatre autres marcheurs, tous allemands. Un couple avait effectivement parcouru toute l’étape une heure avant nous, comme nous l’avions déduit d’après leurs empreintes. Un autre homme d’une soixantaine d’années s’est perdu à plusieurs reprises et a ainsi eu la chance de visiter deux fois Diaccetto. Et une jeune fille est arrivée bien plus tard puisqu’elle n’a pris la route que vers 11 heures. Nous avons passé une soirée très agréable, même si je ne m’étais pas préparée à parler allemand pendant des heures en venant dans cette région !