Nous avions une étape plus courte prévue aujourd’hui et, surtout, nous quittions un patelin pour arriver dans un village tout autant insignifiant. Pas besoin donc d’y être trop tôt puisqu’il n’y aurait ni activité ni lieu à visiter. Nous avons donc mis le réveil plus tard et sommes descendus déjeuner. Tout comme au souper d’hier soir, nos hôtes étaient d’une grande générosité et aux petits soins. Au lieu d’un buffet, chaque table était dressée avec des petits pains, une belle ration de séré, une cafetière et du jus d’orange, ainsi qu’une belle assiette de fromages et charcuteries. La dame nous a encore apporté deux œufs au plat chacun et comme Pascal y est intolérant, je lui ai dit de refuser les siens car je n’allais pas pouvoir manger quatre œufs en plus de tout le reste. Un déjeuner très simple nous suffit normalement, avec quelques tartines ou un joghurt. Nous sommes en outre plutôt végétariens et les tranches de rôti ou de saucisses agglomérées au foie ne font pas partie de nos préférences, mais il est regrettable de jeter de la nourriture. Nous avons donc beaucoup trop mangé et avons poliment mais non sans effroi refusé les suppléments que nous proposait la dame. Certes l’étape du jour s’annonçait simple, mais nous devions tout de même rester capables de bouger !
Nous avons retrouvé l’Eifelsteig après quelques kilomètres dans une jolie campagne et, bien évidemment, de brefs passages en forêt. Nous avons poursuivi dans la forêt jusqu’au village Bruch et son amusant demi-château. Il s’agissait à l’époque d’un petit bourg fortifié dont il reste aujourd’hui une partie du mur d’enceinte, quelques bâtisses et surtout deux hautes tours rondes. Le mur devait forcément être plus long à l’époque et d’autres tours devaient permettre la défense des autres côtés. Il subsiste donc une demi-forteresse pas très crédible puisqu’il semble assez facile de la prendre d’assaut aujourd’hui, mais néanmoins très emblématique.
Nous avons ensuite retrouvé un chemin en forêt le long du ruisseau Gladbach avant de traverser le minuscule village éponyme. Nous avons entonné quelques chants pour l’équipe de foot Gladbach et les nombreux Suisses qui ont porté haut ses couleurs tout en nous étonnant de la petitesse de leur stade. Nous avons également croisé Cris l’escargot, célébrité de Gladbach. Il s’agissait d’un brave gastéropode sur lequel un enfant avait écrit ce prénom et qui nous a bien fait rigoler.
Il n’y a de commerce ni à Bruch ni à Gladbach (sauf peut-être les soirs de Champions League, mais nous sommes vendredi) mais le guide mentionnait un restaurant à Greverath deux kilomètres plus loin. Une fois arrivés au village, nous avons découvert que l’établissement en question n’ouvre que certains soirs. Nous avons par contre trouvé une table de pique-nique abritée au centre du hameau et avons décidé d’y manger car les nuages noircissaient et nous craignions l’arrivée d’un orage. Derrière la clôture de la maison d’en face se trouvait un grand dalmatien très énervé par notre présence. Pendant une bonne demi-heure, il a donc aboyé comme un idiot sans que personne ne s’en occupe.
A peine après être repartis, nous avons pu observer deux jolis chevreuils dans un pré. Avec l’écureuil d’il y a quelques jours et un autre aperçu ce matin, il s’agit des seuls mammifères que nous avons vus en bientôt 300 kilomètres de marche en forêt. Nous sommes ensuite entrés dans une très jolie forêt elfique, en hauteur d’un étroit vallon où un ruisseau chantonnait entre des fougères et des rochers tapissés de mousse.
Le sentier a rejoint une route forestière et nous avons gentiment pris de la hauteur jusqu’à sortir des bois et redescendre vers Zemmer dans la campagne. Nous avons délaissé l’Eifelsteig qui contourne le village pour rejoindre notre hôtel. Nous y avons été très bien accueillis et avons été étonnés par la qualité de la chambre et des services. Comme il s’agissait du seul hôtel du village, nous n’avions pas hésité longtemps avant d’y réserver une chambre mais nous nous attendions à un établissement désuet et plutôt rudimentaire. Bonne surprise !
Après nous être changés, Pascal et moi sommes ressortis pour visiter le coin et trouver une boulangerie. Pascal souhaitait manger une forêt-noire et nous pensions qu’il y avait des chances d’en trouver dans ce village de quelques milliers d’habitants. Que nenni. Il n’y a en réalité absolument rien à Zemmer. Le seul point d’intérêt est sans doute un bout de mur romain. Un panneau routier mentionnait sa direction mais il se trouve en dehors du village et nous ne nous y sommes pas rendus. Il en reste un tronçon de quelques mètres uniquement mais il s’agissait à l’époque d’un mur de 72 kilomètres de long. A part ça, une église et un soi-disant musée qui expose quelques outils et machines agricoles anciens derrière une cordelette pour que le badaud ne touche à rien et n'attrape pas le tétanos. Il y avait peut-être une boulangerie mais nous avons cru qu’il s’agissait de l’atelier et n’avons pas osé rentrer. Il n’y avait aucune devanture, pas d’horaires ni de mot sur une des portes pour indiquer l’entrée et nous avons eu peur de débarquer chez un habitant tout nu.
Nous avons parcouru environ trois kilomètres dans le village. Il est donc plutôt grand et densément construit et, même si de nombreuses maisons semblaient inhabitées, dans l’ensemble il paraît vivant et soigné. Nous avons vu deux restaurants fermés mais aucun bar, coiffeur, kiosque ou cabinet de physiothérapie. Pas d’école non plus. C’est un peu triste de constater qu’il s’agit simplement d’un village-dortoir mais qu’il n’y a aucune activité. A la sortie du village, nous avons finalement trouvé un petit supermarché avec une boulangerie et une boucherie attenantes. Nous avons bu un café à la boulangerie et mangé une boule de Berlin à défaut d’une forêt-noire, puis nous avons acheté un paquet de chips et sommes retournés à l’hôtel. Fin de la visite plutôt exhaustive de Zemmer.