Premier accueil pour pèlerins

Sortie d’Ulm

Le déjeuner était tout aussi bien qu’hier ; autant dire que nous nous sommes empiffrés avant de reprendre la route ! Logan nous paraissait toujours obèse, aussi avons-nous décidé de ne pas trainer et aller tous ensemble griller des calories.

Nous pensions prendre le bus jusqu’au centre et éviter 2,5 kilomètres parcourus au moins six fois entre hier et avant-hier, mais une fois de plus aucune correspondance ne convenait. Au final, nous n’aurons jamais pris le bus à Ulm alors que c’était notre objectif depuis le début de nous économiser un peu…

Après avoir atteint l’hôtel de ville, nous avons rejoint le chemin de Saint-Jacques vers la synagogue, puis dans le Fischerviertel. Déjà là, nous avons dû sortir le guide pour savoir où nous rendre, car les coquilles étaient bien trop espacées et manquantes à de nombreux carrefours. Nous avons traversé une petite place, puis nous devions quitter la vieille ville en passant les remparts. Impossible alors de comprendre quelle porte emprunter, s’il fallait monter sur les remparts un moment, prendre à gauche ou à droite. Nous avons été au hasard, puis avons analysé minutieusement le tout petit plan pour essayer de nous repérer. Nous avons estimé l’emplacement de la gare et nous sommes rendus dans cette direction, retrouvant un peu plus loin le chemin.

Pendant 2 kilomètres environ, nous avons parcouru une immense rue en travaux pour quitter la ville. Le balisage déjà fort foireux était complètement masqué par les machines de chantier et parfois impossible à suivre en raison des routes barrées. Nous sommes néanmoins parvenus sans nous perdre jusqu’à un immense complexe scolaire, derniers bâtiments d’Ulm. Et là, nous nous sommes à nouveau perdus… Dans le parking de l’école, des issues dans tous les sens, une multitude de bâtiments scolaires, pas une seule coquille et notre guide qui nous disait de prendre à droite dans le parking. Certes, mais à quel moment ? Nous devions sembler perplexes, car un couple assez âgé qui se promenait là nous a proposé son aide. Par chance, ils connaissaient très bien l’endroit et nous avons marché quelques centaines de mètres en leur compagnie, avant qu’ils ne nous indiquent la voie à suivre et qu’ils continuent leur propre balade. Nous sommes ainsi passés devant un fort, qui devait être important car la dame m’a tout expliqué de son histoire mais je n’ai rien compris, puis avons arpenté un sentier au milieu de champs et de prés. Notre guide nous signifiait qu’il fallait tourner à gauche au tilleul de Gerd Walter. Ah super ! Celui-là ! Déjà, nous étions soulagés d’avoir appris il y a deux mois à quoi ressemblait un tilleul, ce qui éliminait quelques buissons et de nombreux volatiles. Mais bon, il y avait de nombreux tilleuls un peu partout… Nous avons prié qu’ils aient songé à mettre une plaquette sur ce fameux tilleul, parce que même s’il ressemblait comme deux gouttes d’eau à Gerd Walter, nous ignorons qui est ce brave homme (je dis brave sans le connaître, mais j’imagine qu’on ne dédie pas un arbre aussi noble qu’un tilleul à un goujat…).

Il y avait effectivement une plaquette bien dissimulée contre un tilleul qui ressemblait peut-être à Gerd Walter et nous avons pris un petit chemin à gauche. Cent mètres plus loin, nous sommes arrivés à une intersection. Pas de coquille. Notre guide disait de prendre à gauche et comme le chemin de droite était indiqué comme privé, nous avons tourné à gauche. Après une autre centaine de mètres, ne voyant toujours pas de route qui descendait vers Grimmelfingen, nous avions la sensation de retourner à Ulm. Nous avons alors décidé de revenir sur nos pas et prendre le chemin privé.

Grimmelfingen

Je ne suis pas sûre que nous ayons emprunté la bonne voie, car cela ne semblait pas correspondre à la petite carte du guide, mais après avoir été perdus encore une fois nous sommes arrivés à Grimmelfingen, soulagés. Cette sortie d’Ulm était vraiment nulle ! Fritz a peut-être eu raison de prendre un train jusqu’à ce village pour éviter tout cela…

Nous avons fait une petite pause dans l’église de Grimmelfingen car nous ne trouvions pas de coin à l’ombre. Le chemin passait ensuite dans des forêts, séparées par des champs. Notre guide signalait à un moment de prendre légèrement à droite. Cinq options s’offraient à nous : une route à gauche, quatre qui partaient plus ou moins à droite. Alors “légèrement” à droite, était-ce un peu à droite, un peu plus à droite, un peu moins à droite ou presque droit mais un poil à droite ? Bien sûr, aucune coquille ne venait éclairer la situation. Nous avons pris “un peu à droite”, et après cinquante mètres avons trouvé la route un peu improbable. Revenus au croisement, nous avons aperçu une marcheuse qui buvait à une fontaine à “presque droit mais un poil à droite” et lui avons fait confiance. Effectivement, une coquille indiquait après une vingtaine de mètres que nous étions sur la bonne voie. Je peine vraiment à comprendre pourquoi ils ne précisent pas plus tôt la route à emprunter…

Nous avons marché encore un moment dans de vastes champs, puis traversé une zone industrielle. Le chemin se mêlait ensuite à une piste cyclable, qui longeait un petit canal dans lequel Logan a joyeusement couru.

Erbach

Un peu avant Erbach, nous avons rattrapé Fritz, qui était pourtant parti de Grimmelfingen juste 7 kilomètres plus tôt. Nous avons traversé ensemble ce village, cherchant un coin agréable pour dîner. Nous avons tenté la cour d’école et Fritz a continué, ne voulant pas faire le tour du bâtiment. La cour était néanmoins très sympathique, et nous y sommes restés plus d’une heure et demie, profitant même de faire sieste.

Erbach est définitivement le village le plus accueillant pour les pèlerins et marcheurs jusqu’à maintenant ! Il y avait des jolis chemins pédestres bordés d’arbres, des bancs avec poubelles tous les 50 mètres, des toilettes publiques aussi bien équipées et propres que dans dans un hôtel de luxe, des places de pique-nique également ombragées et un balisage parfait par-dessus tout ! Aucune hésitation possible sur la direction à emprunter, si ce n’est une certaine envie de revenir en arrière quand nous avons vu que nous quittions le village.

Franchement, chapeau et merci Erbach !

Cursillo-Haus

Il nous restait à peine une heure et demie de marche après dîner, tout d’abord sur un chemin paisible à l’orée d’une forêt. Il faisait très chaud, Logan tirait la langue, aussi avons-nous décidé de refaire une pause dans un petit village à mi-distance. Nous ne savions ensuite pas où repartait le chemin et avons pris la mauvaise direction. Quand nous l’avons remarqué, nous devions remonter au centre du village quelques centaines de mètres en arrière et cela nous embêtait un peu. Nous avons alors suivi la piste cyclable et retrouvé le chemin à 500 mètres environ de notre hébergement. Faire du vélo doit vraiment être agréable dans cette région, car la plupart des pistes sont larges, très bien entretenues et séparées de la route. De plus, c’est vraiment très plat donc les kilomètres doivent vite défiler.

Nous avons rattrapé Fritz à 100 mètres du gîte et juste devant lui se trouvait Ingo, un autre pèlerin. Nous sommes donc arrivés tous en même temps, ce qui est assez amusant parce que nous n’avons marché ensemble que les dix derniers mètres.

Nous avions choisi de loger ce soir au Cursillo-Haus car c’est le siège de l’association régionale du pèlerinage de Saint-Jacques. Nous voulions retrouver cet esprit rencontré en France et en Espagne il y a trois ans, avec une grande table commune pour le souper et le déjeuner et un partage d’expériences entre pèlerins. Nous craignions cependant de tomber dans un lieu extrêmement religieux, avec prière commune avant le repas, chants et autres joyeusetés qui nous agacent rapidement.

Nous avons été reçus par Ulli, l’être le plus zen qui doit habiter cette planète. Je ne suis pas sûre que cet homme se soit déjà énervé une fois dans sa vie. Il parle doucement et ne prononce jamais un mot de trop, il est plutôt beau garçon avec des yeux qui pétillent d’amour, s’habille en couleur pastel et doit porter des pantalons de lin. J’aurais eu envie de le secouer un peu mais je pense qu’il m’aurait simplement délivré un sourire d’une douceur extrême et un regard bienveillant… J’aurais bien aimé écrire quelque chose de négatif ou de drôle sur lui, mais je ne vois vraiment pas quoi. C’est un vrai gentil, ce monsieur !

Pour notre plus grand plaisir, nous logeons dans une petite maison à côté du bâtiment principal à cause de Logan. Il y a plusieurs chambres avec de nombreux lits dans notre logis, une salle d’eau à l’étage dont les catelles arborent fièrement des coquilles Saint-Jacques. Nous avions pas mal transpiré et nous réjouissions de prendre une douche, quand ce fut le drame. Le plafond était si bas qu’une fois dans la douche ma tête touchait le plafond et je devais me contorsionner pour espérer laver un peu ma soyeuse chevelure. Le pommeau de douche était cassé et dès que je l’ôtais de son support, l’eau giclait absolument partout sauf là où il fallait. Le pas-de-vis était fendu et menaçait de se détacher complètement. J’ai donc reposé la douche et me suis contorsionnée de plus belle.

Nous avons ensuite soupé tous ensemble. Beate, la pèlerine croisée plus tôt dans la forêt, venait également d’arriver. Elle est professeure d’anglais à Francfort. Ulli enseigne aussi à Francfort, mais les mathématiques. Quant à Ingo, il vient de Dortmund et a jusqu’au mois de juin 2017 pour marcher. Il a déjà fait pas mal de détours, suivant d’abord la Moselle et rejoignant ensuite Nuremberg en train pour y suivre une autre voie que celle que nous avons empruntée. Il pense aller à Compostelle en passant par Toulouse, puis rentrer à pied pour Noël et peut-être aller à Jérusalem avec un chien ensuite. Fritz, vous le connaissez déjà bien ! Il s’est montré toutefois beaucoup plus effacé que quand nous étions les trois, parlant très peu. Beate était assez béate, Ulli était de plus en plus serein, c’est Ingo qui parlait le plus et le plus fort.

Nous avons passé une belle soirée, la salade réalisée par Ulli était excellente et presque apaisante, puis nous avons admiré le magnifique coucher de soleil sur la campagne en compagnie de Fritz.