Ascension, fleurettes et vaches folles

Comme nous n’avions rien de prévu ce week-end et que le temps s’annonçait plaisant, nous avons décidé avant-hier de poursuivre cet itinéraire initié l’an dernier. Nous sommes arrivés hier soir à Bienne où nous avons trouvé un hôtel tout à fait incofortable. S’il était propre et plutôt bien situé, il proposait une literie épouvantable à moins d’aimer dormir sur des ressorts bicentenaires et avait des stores cassés dont les lamelles pendaient sottement et grinçaient à chaque coup de vent. Il y a beaucoup de vent à Bienne. Il faisait donc jour très tôt et le doux krrr-krrr des stores s’accordait à merveille avec les sons métalliques des ressorts du matelas. 

Nous avons quitté ce havre de paix assez tôt pour prendre le train pour Frinvillier. Nous avons quitté la gare et avions parcouru une cinquantaine de mètres quand nous avons réalisé avoir oublié d’acheter des bouteilles d’eau. Pas une seule goutte à se verser dans le gosier. En survolant du regard le charmant patelin qui se dressait devant nous, nous avons rapidement compris qu’il ne comportait pas le moindre magasin. Et comme l’étape du jour se déroulait essentiellement dans des alpages et des forêts, nous sommes retournés à Bienne afin d’y acheter de l’eau. Quarante minutes plus tard, nouvelle arrivée à Frinvillier avec le bus cette fois-ci et vrai départ de l’étape.

Au milieu des fleurs

Le chemin partait directement dans une forêt et montait sur plusieurs kilomètres. Le guide indique que cette ascension est “particulièrement difficile” et conseille de prendre un bus qui conduit en gros au milieu de l’étape. Nous étions donc préparés à faire de la varappe et avons été légèrement déçus de découvrir un joli sentier forestier en lacets. Bien que la montée soit très longue et ininterrompue, elle n’était pas si raide ou scabreuse et la forêt était vraiment belle. Nous y avons de plus croisé un joli chamois téméraire qui a pris la pose à 20 mètres de nous.

A la sortie du bois, nous avons rejoint de magnifiques alpages dont les milliers de fleurs enchantaient nos mirettes. Ces pâturages ne sont absolument pas traités afin d’y favoriser la biodiversité et c’était réellement incroyable de se promener parmi des lits de fleurs bourdonnants. Il y avait également de nombreux arbres qui protégeaient du soleil et du vent. A plusieurs reprises, nous avons vu de grands troupeaux de vaches complètement surexcitées, notamment ce troupeau d’une cinquantaine de bêtes qui hurlaient (non, ce n’était pas des meuglements distingués) et, emmenés par Mireille la fougueuse noire et blanche, couraient de part et d’autre de l’enclos. Nous en avons conclu qu’elles devaient avoir tout juste rejoint l’alpage et étaient autant heureuses que des enfants à la piscine…

C’était une étape vraiment plaisante, avec en prime de jolis points de vue sur les lacs de Bienne, Morat et Neuchâtel. Les Alpes étaient malheureusement dissimulées par de lointains nuages, comme c’était le cas l’année passée.

Nous avons fait une pause dans une buvette d’alpage vers midi pour y manger un gâteau qui, comme Pascal le résume parfaitement, “n’avait rien pour lui”, puis une seconde halte dans la nature pour y pique-niquer.

Chasseral

Une dernière ascension dans un paysage balayé par le vent nous a conduits au sommet du Chasseral, point culminant du Jura bernois surmonté d’une antenne géante nous rappelant la fusée de Tintin. Le vent froid qui soufflait au sommet nous a dissuadés de nous y arrêter, aussi avons-nous poursuivi sur une route puis un chemin dans les alpages jusqu’à la métairie où nous dormons ce soir. Il n’y avait plus de chambre libre à l’hôtel du Chasseral et c’est pourquoi nous avons contacté cette ferme. Au téléphone, la dame n’a pas songé utile de me préciser qu’il s’agissait d’un dortoir rustique avec pour tout confort des matelas étalés au sol et quelques couvertures. Nous n’avons emporté avec nous ni sac à viande, ni sac de couchage et à l’heure où j’écris ces lignes sur la terrasse de mes doigts congelés par la bise, j’ignore encore s’il y aura de l’eau chaude pour une toilette rudimentaire dans le lavabo des toilettes…