Un air de déjà vu

En consultant la carte, nous avons réalisé que nous pouvions partir depuis Lachen où nous avons dormi plutôt que retourner en bus à Galgenen pour reprendre la marche où nous l’avions arrêtée hier. Les distances étaient équivalentes, mais vu l’étape d’hier, nous n’avions pas forcément envie de retourner à Galgenen pour marcher sur du goudron dans des quartiers insignifiants… Lachen ne se situe pas sur le chemin officiel, mais de nombreux chemins de randonnée y passent.

Nous avons donc quitté l’hôtel et marché jusqu’à la gare où nous avons trouvé de nombreux panneaux de randonnée. Einsiedeln était indiquée à deux reprises, une fois sur le chemin panorama alpin et une fois sur le chemin de Compostelle. Sans surprise en analysant les noms de ces chemins, la première variante montait jusqu’à un col pour parcourir des crêtes offrant de belles vues sur le lac de Zurich tandis que la deuxième était plus directe et passait devant une jolie chapelle. Comme la durée annoncée était de près de heures en moins pour le chemin de Compostelle, nous avons choisi de suivre ce tracé.

Nous avons donc parcouru une petite route qui montait gentiment jusqu’à la jolie chapelle, avant de poursuivre sur des routes de campagne d’où nous avions aussi une belle vue du lac et de Rapperswil sur la côte en face. L’ascension n’était pas trop ardue et certains passages en forêt offraient un peu de fraîcheur et des sols plus agréables sous la semelle.

Etzelpass

Peu avant le col de l’Etzel, point culminant du jour, nous avons rejoint le chemin 4 venant de Rapperswil que Pascal et moi avions emprunté il y a bientôt quatre ans. Tout le reste de l’étape était ainsi identique à celle de notre précédent voyage, ce qui ne nous dérangeait nullement puisque nous en avions conservé un excellent souvenir. Vous pouvez consulter le récit (plutôt drôle) de cette étape ici.

Une fois au sommet, nous voulions faire une pause et avons trouvé la terrasse du petit restaurant fort attrayante. Elle était cependant en plein soleil alors nous avons demandé à la serveuse s’il y avait une table à l’ombre. Elle a longuement observé la terrasse autour d’elle avant de secouer la tête, visiblement peu encline à ouvrir un des nombreux parasols. Nous avons donc fait notre pause à 20 mètres de là, sur des cailloux à l’ombre et abrités du vent. Il y avait des dizaines de cyclistes et de marcheurs, partis pour une promenade ou en route pour de plus longues aventures. Un couple portait de lourds sacs avec la coquille reconnaissable des pèlerins de St-Jacques, mais ils ne nous ont pas répondu quand nous les avons salués. Les dépassant plus tard, nous avons remarqué qu’ils communiquaient en langue des signes. Cela n’avait pas l’air évident, puisque le garçon marchait bien devant la fille et ne la voyait donc pas quand elle lui sommait de l’attendre et de prendre des photos du paysage. L’ambiance n’avait pas l’air au beau fixe et nous avons des doutes quant à la durée de leur périple…

Après la pause, nous avons marché sur la route, malheureusement assez passante, jusqu’au pont couvert Teufelsbrücke, puis le chemin partait dans les champs et délaissait voitures et vélos. Nous avons grimpé jusqu’à un petit plateau, où nous avons choisi de pique-niquer. Pascal et moi nous souvenions de la grange devant laquelle nous nous étions arrêtés la dernière fois, mais aussi qu’il existait un endroit bien plus attrayant non loin. Nous avons ainsi marché jusqu’à cet abri bien conçu, comptant de nombreux bancs et une poubelle.

Einsiedeln

Il nous restait alors moins d’une heure à parcourir jusqu’à Einsiedeln. Nous avons passé avec prudence le pré dans lequel Logan s’était blessée la dernière fois, Pascal refusant de la lâcher puisqu’il semblait encore traumatisé. La maison de notre ami moine a changé de propriétaire et nous l’avons dépassée avec nostalgie, avant de poursuivre jusqu’à la place devant l’immense monastère. Notre hôtel s’y situe et nous l’avons choisi pour cet emplacement privilégié, son prix bas et surtout l’expérience promise par les précédents clients sur le site de réservation. La plupart mentionnent une certaine intimité avec le voisinage. Nous n’avons pas été déçus : les fenêtres sont en effet parfaitement alignées avec celles de l’immeuble en face, très proche. C’est surtout celle dans la salle de bains qui occasionne des critiques, puisqu’elle ne comporte pas de stores et offre ainsi aux voisins une vue inouïe sur nos fesses blanches ou nos corps entiers en sortant de la douche. Nous avons beaucoup ri en découvrant que c’était réel et à quel point c’était insensé. Rapidement néanmoins, nous avons coincé un linge dans la fenêtre pour ne pas provoquer de jalousie.

Le seul inconvénient d’avoir le plus grand couvent de Suisse à moins de cent mètres de son hôtel, c’est qu’il donne l’impression de dormir dans le clocher. Et autant dire que le sonneur d’Einsiedeln s’en donne à coeur joie, puisqu’il annonce avec insistance chaque heure de prière, chaque messe et deux fois chaque heure pleine en plus de chaque quart d’heure. Autrement dit, c’est un fabuleux récital de carillon.